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Hasta Siempre Colombia n°2 - Villa de Leyva

Publié le par Yves

16 juillet, pas le temps de dire ouf, car à peine sommes nous arrivés à la gare routière qu’un bus nous emporte vers Villa de Leyva. On est tombé sur un pilote de rallye inconscient qui ne sait sans doute pas lire les panneaux pourtant énormes « las imprudencias en la via son fatales ». On l’a échappé belle.




A Villa de Leyva, on s’attendait à une grosse fête pour El Dia de la Virgen del Carmen. On n’a pas été déçu puisque c’est La Semana de la Virgen del Carmen, avec comme point d’orgue la journée du 16. Nous sommes le 16. Villa de Leyva est une petite ville, très ancienne et très bien conservée, à l’architecture homogène, dégageant une impression d’authenticité et un charme fou fou fou. Rues pavées par de grosses pierres où les talons sont maudits, maisons blanches aux toits de tuiles, aux belles portes en bois, abritant souvent de magnifiques patios, des petits jardins soignés et fleuris. Bien que très animée, la ville conserve un côté paisible et accueillant où il fait bon flâner. Nombreux sont ceux qui viennent célébrer la vierge, nombreux sont ceux qui viennent profiter de l’aubaine pour faire prospérer leur commerce.

Près de la gare routière, sont rassemblés les marchands de chipolatas multicolores à « déguster » avec des petites pommes de terre rissolées. C’est super gras. A tous les coins de rues, sont installés des vendeurs de poulets rôtis, d’arepas, de sandwichs ou de hamburgers. Sur la plazza mayor se concentre une grosse partie du commerce. D’abord les fournisseurs de bière, le cœur de la fête (sponsorisée par une célèbre marque jaune – elle a bon dos la vierge), qui écoulent des quantités astronomiques du matin au soir. Ensuite, les vendeurs de pâtes de fruits de goyaves et autres sucreries, des marchands de chapeaux, de panchos, de poteries, de tirelires en forme de cochon (code international des petites économies), des stands de jeux type kermesse, et des attractions foraines type manège à rotation manuelle, toboggan gonflable géant ou intraitable rodéo mécanique ; et un stand singulier proposant de soigner tous les maux grâce à la bave d’escargots mutants. Toute la journée De grosses enceintes diffusent de la musique colombienne.



 

En début de soirée, au bout de la rue principale, à l’entrée du village, phares, gyrophares et klaxons annoncent l’arrivée très attendue de la procession. En tête de cortège, un pick-up porte la Virgen del Carmen, suivi par des hommes portant une sorte de maquette géante de la ville, suivis eux-mêmes par un camion bâché à orchestre, puis de nombreux véhicules, motos et mobylettes. Les piétons se débrouillent pour suivre le cortège sans se faire écraser. La procession termine son parcours devant l’église, sur une place où les gens se rassemblent massivement. Une fanfare dirigée par un personnage « Botérolien » entame des standards colombiens entrecoupés d’interventions laconiques psalmodiées du curé local remerciant la Virgen del Carmen pour cette journée merveilleuse placée sous le signe de l’amour, de la paix, du partage et du feu d’artifice coloré qui nous ravit et nous réchauffe le cœur. C’est vrai qu’il a du chien ce feu d’artifice. Au début, on pense qu’ils se moquent du monde avec leurs petites fusées placées au bout de longues perches qu’une bande de vieux propulse à cinquante mètres de haut à mains nues, comme les gosses lancent des pétards. Des vrais gosses ces vieux. Puis le spectacle prend de l’ampleur avec comme apogée la mise à feu de deux totems ingénieusement préparés par les techniciens pyrotechniques, s’allumant progressivement de bas en haut pour finalement dévoiler au milieu des flammes une peinture de la vierge, fabuleuse apparition divine. Le final est aussi à la hauteur de la divinité avec son explosion de bruits et de couleurs digne d’un 14 juillet. Nous sommes quand même le 16… c’est dingue ! La foule se dirige ensuite vers la plazza mayor, où dans un tout autre style un groupe, accompagné de trois danseuses de type « bombasses refaites des pieds à la tête se trémoussant inlassablement », distille toutes les musiques sud-américaine, rumba, salsa, cumbia… La bière coule à flots et les corps s’agitent. Ça dansera jusqu’au bout de la nuit.

 

 

Villa de Leyva vaut son pesant d’or pour son architecture, son ambiance festive et en même temps paisible, sa population détendue et souriante, mais aussi pour ses alentours. Une petite balade permet d’accéder à Sagrado Corazon, une sainte perchée au-dessus de la ville, d’où la vue s’étend sur toute la vallée. Imprenable. Dans la vallée de nombreux sites à visiter parmi lesquels une maison insolite construite par Octavio Mendosa, un architecte un peu fou. Prenez de la terre crue comme unique matériau de construction, quelques mosaïques pour la décoration, mélangez Barpapapa, Dali et Gaudi, et vous aurez une idée de cette construction géniale.

http://www.casaterracota.com/

http://www.colarte.arts.co/colarte/conspintores.asp?idartista=7096

 

 

 

Sur le chemin du retour nous prenons un verre de rouge dans le vignoble local, et c’était une très mauvaise idée sauf si on kiffe le vinaigre. On a appris plus tard que les Colombiens font du vin pour les Colombiens sans chercher à concurrencer Chiliens ou Français, simplement en respectant les goûts locaux. Et à ce niveau pas de doute, tous les goûts sont dans la nature ! A la recherche d’un dîner couleurs locales, nous croisons un type qui insiste pour nous faire tester les meilleures arepas de toute la région, pleines de fromage dégoulinant et garnies de deux saucisses maison. Muy rico y muy bueno. Le gars est sympa comme tout, un peu comme un Colombien. On craque aussi sur la sauce exquise, les patatas crillolitas et la bonne grosse chipolatas, grosse et bonne… Le monsieur assis à côté de nous, c’est justement l’architecte un peu fou. Tout le monde à son grain de folie, le sien se voit peut-être un peu plus. Un peu fou donc, très malin et cultivé, gentil comme un Colombien, et dont l’inspiration se base beaucoup sur les énergies, l’au, l’air et la terre. Nous sommes invités à participer à un cours-discussion, demain, dans la maison. Je crois surtout qu’il a très envie de revoir Pascale qui lui rappelle un modèle de Modigliani. Sur la place, d’autres groupes se succèdent, musiques et danses plus traditionnelles, façon campesinos. Tout le monde danse, jeunes, vieux, étudiants, paysans, papis, mamis… en procédant par petits pas et légers déhanchements. C’est beau à voir. On va se coucher à l’heure des poules car demain c’est randonnée.

 

Donc aujourd’hui c’est randonnée en compagnie d’Augusto, notre guide pour l’occasion, et surtout pour éviter de se perdre dans la selva. C’est pas l’Amazonie mais la végétation est quand même bien dense. Ici tout pousse comme du chiendent sauf que c’est bien plus joli. Impossible de décrire ou de citer toutes les plantes que nous croisons. Quelques-unes sont quand même singulières et méritent quelques lignes. D’abord la « barba del viejo », une plante grise filandreuse qui pendouille des arbres comme des milliers de guirlandes ternes. Les Aloes géants aux feuilles démesurées et à l’immense fleur fatale. Les épiphytes qui colonisent les arbres comme si elles étaient ses propres fruits. On randonne en plein délire végétal. Mais les clous du spectacle sont deux magnifiques cascades dissimulées au cœur de la forêt, accessibles par un chemin non moins dissimulé. C’est là que le guide prend toute sa dimension. L’appel de la douche a eu raison de notre bien être pour un massage naturel 100 % aquatique. La suite de la randonnée nous conduit au milieu de la rivière bouillonnante, puis dans le lit paisible d’une autre que nous remontons avant de franchir « el salto del angel », un passage très étroit quasiment suspendu dans le vide, où il faut mettre pendant quelques secondes son vertige dans la poche.

 

 

De retour à Villa de Leyva, nous retrouvons la fête de Carmen la vierge, consacrant cette fin de journée à des activités traditionnelles. Nous assistons donc à un défilé de haute couture consacré aux panchos, ainsi qu’à la fin du concours de filage de laine regroupant les meilleures mamies de la région. C’est presque émouvant toutes ces petites vieilles très sérieuses et en même temps fières de montrer leur savoir-faire. Ce soir nous boudons la fête et profitons de l’auberge, du site bucolique et de la cuisine self-service pour confectionner LA salade du chef. Petit bémol à cette paisible soirée, les gringos nord-américains qui n’ont pas encore intégré l’Obamania et pensent toujours en terme de suprématie entre USA et le reste du monde, et ça s’entend jusqu’à 4h00 du matin.

 

 


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